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Si la culpabilité turque se confirme, et c'est bien parti pour, ça en dit long, très long, sur l'état de décadence morale, éthique et politique de l'Occident qui, pour protéger un allié membre de l'OTAN et faire tomber Assad, s'est vautré dans le mensonge le plus sordide.

Les attaques chimiques de la Ghouta d'août 2013 avaient, on s'en souvient, créé un choc dans les opinions publiques occidentales, déjà patiemment travaillées depuis des mois par les habituelles officines et leurs relais médiatiques. Bachar massacre son peuple [alors que la guerre chiite-sunnites dure depuis des siècles en Syrie et que la moitié des morts du conflit actuel appartient au camp loyal au régime], Bachar assassine la démocratie [alors qu'à côté des vrais manifestants pacifiques sont apparus presque immédiatement des groupes sunnites fondamentalistes financés depuis des années par l'Arabie saoudite et le Qatar]. Et maintenant Bachar gaze son peuple ?! C'en est trop, bombardons le boucher de Damas !

Sauf que...

Un premier gros doute était apparu quelques mois plus tard lorsque le prestigieux MIT de Boston avait remis en cause la thèse bancale des chancelleries occidentales en démontrant que les attaques chimiques avaient été lancées depuis une zone tenue par les rebelles. Etude de missiles, d'ogives, calcul des trajectoires, du volume de gaz etc., la conclusion s'imposait : les missiles avaient été lancés à moins de 2 km, alors que l'armée syrienne était au bas mot à 10 km. A l'époque, seul le Point avait courageusement relayé l'information dans l'omerta généralisée de la mafia médiatique (notons tout de même les contorsions acrobatiques de l'article qui finit par conclure que, oui, les attaques ont été lancées depuis une zone rebelle, mais c'est quand même l'armée de Bachar qui l'a fait. Que voulez-vous, les consignes sont les consignes...)

Une analyse détaillée de l'un des plus grands journalistes d'investigation américains, Seymour Hersh, très bien introduit dans la communauté du renseignement, venait quelques temps plus tard confirmer ces doutes : les analyses du laboratoire de la défense de Porton Down montraient que le gaz sarin utilisé à la Ghouta ne correspondait pas à celui que possédait l'armée syrienne. Déjà la piste turque était pointée du doigt via les groupes djihadistes qu'Ankara supportait, dont un certain Al Nosra... La manipulation était vieille comme le monde : blâmer Assad de l'attaque chimique et provoquer l'intervention militaire américaine, Obama ayant promis de bombarder le régime en cas de dépassement de la "ligne rouge". On connaît la suite : les gouvernements américain et français ont présenté en quatrième vitesse des "rapports" caviardés des agences de renseignement pour justifier les bombardements sur Assad avant que le "non" du parlement britannique vienne mettre le holà à ce délire. Poutine offrit une échappatoire à Obama avec l'accord sur le désarmement chimique de Damas. Le plan d'Erdogan, le sultan du sarin, avait fait long feu...

Car on est maintenant à peu près sûrs de la responsabilité d'Ankara dans ce massacre. Il y a trois jours, deux députés du principal parti d'opposition, le CHP, ont accusé, détails à l'appui, le gouvernement turc d'avoir fourni aux djihadistes le gaz sarin utilisé en août 2013 à la Ghouta. Le parquet de la province d'Adana a en effet ouvert une enquête que tente de freiner des quatre fers Erdogan. Ce sont les éléments de cette investigation que reprennent nos deux députés : dossier, enregistrements audio... Ils démontent, avec noms, dates et adresses, la filière utilisée. Avec la parfaite complicité des renseignements turcs, la Turkish Mechanical and Chemical Industry Corporation, a procuré au responsable local d'Al Nosra, Hayyam Kasap, le gaz sarin utilisé pour faire porter le chapeau à Assad.

Turquie, Arabie Saoudite, Qatar, dirigeants occidentaux, Al Qaeda, Daech : manipulations sordides, alliances inavouables et maintenant false flag ignoble... le conflit syrien fait ressortir l'hydre de Lerne des temps modernes.

Le sultan du sarin : la Turquie derrière l'attaque chimique de la Ghouta
Tag(s) : #Moyen-Orient, #Europe, #Etats-Unis

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